La liberté d’expression (6) : Fighting Words

Ce billet répond à trois questions.

1. Qu’est-ce que les fighting words ?

2. Les fighting words sont-ils protégés par le Premier Amendement ?

3. Si non, pourquoi pas ?

Qu’est-ce que les fighting words ?

Il est juste de dire que la catégorie des fighting words a été considérablement limitée dans les années depuis Chaplinsky v. New Hampshire, 315 U.S. 568 (1942), l’affaire séminale des fighting words discutée ci-dessous. D’après ce que j’ai lu dans les affaires ultérieures, les mots de combat sont des insultes directes qui peuvent être fondées sur la race, l’origine ethnique, la religion ou le sexe, mais qui ne doivent pas nécessairement l’être. Par exemple, le fait de s’approcher de quelqu’un et de lui crier une insulte profane à l’égard de sa mère peut constituer des paroles de guerre. Mais porter une banderole en face de cette personne avec le même message ne constitue pas des paroles de combat qui peuvent être punies.

Les paroles de combat ne sont pas protégées par le Premier amendement

La Cour suprême l’a expliqué ainsi dans l’affaire Chaplinsky :

Il existe certaines classes de discours bien définies et étroitement limitées, dont la prévention et la punition n’ont jamais été considérées comme soulevant un quelconque problème constitutionnel. Il s’agit notamment des propos obscènes, profanes, diffamatoires, insultants ou « combatifs », c’est-à-dire ceux qui, par leur seule expression, infligent des blessures ou tendent à inciter à une violation immédiate de la paix. (…) de tels propos ne constituent pas une partie essentielle de toute exposition d’idées, et ont une valeur sociale si faible en tant que pas vers la vérité que tout bénéfice qui peut en être tiré est clairement dépassé par l’intérêt social de l’ordre et de la moralité.

Pourquoi les mots de combat ne sont-ils pas protégés ?

La réponse de la Cour dans Chaplinsky est de plusieurs ordres.

Tout d’abord, il y a un fondement historique, selon la Cour, à savoir qu’il n’a jamais été pensé autrement. Mais cela n’est pas entièrement satisfaisant car la Cour énumère également le obscène et le profane, qui sont tous deux (tant qu’ils ne sont pas obscènes) désormais protégés par le premier amendement. En outre, la Cour énumère le diffamatoire, mais cette catégorie est désormais considérablement limitée par l’arrêt New York Times v. Sullivan, 376 U.S. 254 (1964), qui a constitutionnalisé la diffamation en ce qu’elle touche non seulement les fonctionnaires et les personnalités publiques, mais aussi les personnes privées lorsque le discours porte sur une question d’intérêt public.

Deuxièmement, la Cour suggère que les paroles de combat tendent à inciter à une violation immédiate de la paix, une justification qui rappelle le test du danger clair et présent de Holmes et Brandeis. Mais cette explication n’est pas non plus satisfaisante : en présence de propos belliqueux, il n’y a pas lieu de se demander s’il y a effectivement un danger clair et présent. Peut-être la réponse est-elle que la réaction violente d’une personne à des paroles de combat est immédiate et instinctive ; il n’y a pas de temps pour un contre-discours.

Troisièmement, la Cour s’engage dans ce qu’on a appelé l’équilibrage catégorique. À savoir, elle met en balance l’intérêt de la liberté d’expression dans, disons, les mots de combat, avec l’intérêt social dans l’ordre et la moralité, et trouve qu’en règle générale, ce dernier l’emporte sur l’intérêt de la liberté d’expression. Il est intéressant de noter que la Cour s’engage ainsi dans une discrimination de contenu qui n’est autrement pas permise aux gouvernements agissant dans un rôle de régulation. En outre, l’équilibrage catégoriel semble incompatible avec la logique du marché des idées.

L’exclusion des mots de combat et des autres catégories de la protection (ou de la couverture) du Premier Amendement reflète ce qui a été appelé la « théorie à deux niveaux » du Premier Amendement, une théorie qui se fonde sur le contenu du discours.